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Crise de l’école de base et report des examens : Quels enseignements ?

tribune la presse

 

Par Ridha ZAHROUNI*

Comme toujours, et à chaque fois qu’il y a un bras de fer entre le ministère et les syndicats, c’est l’élève et le parent qui payent. On a vécu plusieurs situations de blocage, pratiquement chaque année, qui se manifestent toujours par la perturbation du déroulement normal des cours. Et l’hypocrisie qui s’est toujours manifestée lors de la gestion de pareilles situations, c’est qu’on revendique des droits et des avantages au profit des enseignants et qu’on évoque comme motivations l’intérêt de l’élève et de son école. Et comme à l’accoutumance, on arrive à une conclusion à l’amiable du conflit et la situation pour nos élèves, leurs parents et également pour le pays continue toujours à aller de mal en pis.

La crise qu’a connue l’école de base enclenchée lors du démarrage de l’année scolaire en cours et le chambardement du calendrier scolaire confirment la mauvaise gouvernance du secteur. En effet, le report des examens n’est en fait qu’une formalité, je dirais arithmétique, pour récupérer un peu du temps scolaire gaspillé à cause d’un problème qui n’aurait pas dû être posé. Elle a pour juste finalité de prolonger l’année scolaire de deux semaines. Et ce sont les élèves qui vont payer, surtout ceux issus des familles à faible revenu ou des régions intérieures du pays. Chez qui on va voir, dans quelques années, le nombre de décrocheurs augmenter et le taux de réussite chuter. Ceux qui ont les moyens pour financer des cours particuliers ne vont pas sentir les méfaits de telles crises, sauf au niveau de leurs bourses.

Evidemment, les élèves qui n’ont pas été dérangés par la grève, c’est-à-dire ceux qui se sont préparés pour les examens comme prévu initialement, vont voir le programme de leurs vacances certainement perturbé. Mais, honnêtement, avions-nous des solutions qui satisferont tout le monde. Personnellement, je ne le pense pas, car il y a plusieurs cas de figure à prendre en compte, suivant les matières, les établissements et les niveaux concernés. Ils sont plusieurs à être mécontents de cette décision de report, ils ont même créé une page Facebook pour manifester leur refus de cette décision, et ils ont raison. D’ailleurs, Monsieur le ministre a sollicité leur compréhension, On aurait pu penser à une fusion des deux premiers trimestres, mais je suis sûr qu’il y aurait toujours des parents, des enseignants et des élèves qui seront insatisfaits et vont se réclamer lésés.

Pour les parents dont les élèves sont inscrits dans des établissements scolaires privés, comme pour les responsables de ces établissements, ils vont voir dans la décision de report des examens une injustice. Ils vont s’estimer payer pour un conflit qui ne les concerne pas, notamment à cause du prolongement de l’année scolaire de deux semaines. Effectivement, outre la perturbation du calendrier scolaire, le report des examens se traduira pour eux par des coûts supplémentaires à supporter aussi bien par les parents que par les établissements.  Mais les préjudices que vont subir les écoles privées sont incomparables aux dégâts occasionnés aux enfants qui ont perdu plus de deux mois de scolarité, des dizaines de milliers. A mon avis, il faut faire preuve de solidarité dans de pareils cas.

J’estime, pour ma part, que la décision du report des examens et de ses conséquences sur la révision du calendrier de la totalité de l’année scolaire n’est qu’une formalité technique comme évoqué précédemment. Elle a uniquement pour conséquences de gagner deux semaines supplémentaires au niveau de l’année scolaire en cours.  Mais elle ne pourrait en aucun cas être considérée comme une décision visant la garantie de l’égalité des chances. D’ailleurs, dans son état normal, notre école est incapable d’assurer l’égalité des chances entre les apprenants. La réussite est fortement corrélée avec le niveau social et culturel des familles et des régions. On ne parle plus ni de gratuité, ni d’ascendeur social quand il s’agit de notre école publique. Et en aucun cas on est en mesure de récupérer deux mois de perte au niveau du calendrier scolaire. Nous avons vécu une situation pareille lors de la crise du Covid, le taux des décrocheurs a augmenté de 50 %, nous sommes passés de 70 mille à 109 mille décrocheurs.

Je reste convaincu que pour que  notre école publique devienne réellement juste, gratuite et ascenseur social, il faut prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter que de telles crises se reproduisent en engageant sans aucun délai une vraie refonte de notre système éducatif. Un tel projet ne pourrait aboutir et réussir si l’on ne confie pas la mission au Conseil supérieur de l’éducation constitutionnellement créé.

R.Z.

*Président de l’Association tunisienne des parents

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